LA CROIX MYSTIQUE                                                                        > retour

V

 

VOIR UNE ÉGLISE CENTRÉE EN CROIX APPARENTE

 

Les églises centrées, sans doute marquées par la structure des anciens monuments funéraires, allient la compacité du mur, le plan en croix, l’usage de la coupole et même un allongement en rapport avec celui des basiliques. Souvent, ces églises, même de petite taille, ressemblent à de merveilleux diamants dont les différents volumes imbriqués reflèteraient les beautés du paysage et rassembleraient en un concentré acéré d’énergie ce que les collines alentour dispersent en doux, subtils et délicats moutonnements. Quatre corps de bâtiment, avec façade, pignon et fenêtre, s’unissent à angle droit et convergent vers un centre : ils créent une église en forme de croix ; le lieu du croisement se matérialise en un carré central qui, juste au-dessus des bras de la croix, annonce discrètement mais expressément sa fonction ; ce carré constitue le passage entre les quatre bras de la croix et le toit conique qui donne à l’édifice son allure si particulière.


Le toit conique, perché sur une tour, dit haut et fort qu’il couvre nécessairement une coupole : l’église est toute tendue vers sa coupole. Mais les deux bras est et ouest, plus longs que les bras nord et sud, manifestent l’orientation de l’église et appellent le fidèle à porter son attention vers l’est où se trouve l’autel principal. Le fidèle devrait-il être partagé entre l’attirance vers la coupole et l’appel de l’autel ? Ne conviendrait-il pas plutôt que l’incroyable imbrication de membres architecturaux qui, dès l’extérieur, donne aux églises arméniennes une part importante de leur originalité, amène ce fidèle à tenter une mise en relation active, résolue et donc complexe ?


Si, de l’extérieur, la coupole est prééminente et confère à l’église une spiritualité acérée plus encore que glorieuse, l’intérieur désigne l’autel comme lieu de médiation entre le divin et l’humain tout en réservant à la coupole l’idée d’un idéal divin, visible mais quasi inaccessible. En réalité, l’église est le lieu d’une tension entre le monde de l’existence humaine et celui de la perfection divine.

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