YERTIK

Habitat traditionnel d’Arménie

 

EXPOSITION DU 6 MARS AU 30 JUIN 2009 À LA GALERIE MÉDIANE

 

Dans les anciennes glkhatoun quelquefois dénommées yertik, ces maisons délaissées ou au mieux transformées en remises, dans ces reliques d’un autre temps dont la présence est attestée depuis deux mille cinq cents ans et qui nous mettent en contact avec l’habitat néolithique de ces contrées recouvrant notamment le territoire de l’Arménie historique, perdure la mémoire d’un mode de vie ancestral. La lumière, le foyer et le pain, valeurs quasi universelles, y sont étonnamment unis : dans les yertik se trouve la solution constructive et architecturale pour que les grandes valeurs fondamentales de l’humanité, du moins pendant les millénaires qui nous ont précédés, soient combinées en une synthèse originale et hautement symbolique. Reconnues et pensées comme le ferment de la société, elles se constituent en axe unifié autour duquel s’organisent l’espace, le temps et la vie.

Les maisons sont en continuité avec les jardins et les champs. Construites sur un seul niveau, elles sont dotées de murs épais dont apparaît la belle pierre volcanique, souvent très colorée ; des murs que ne perce aucune fenêtre. Elles sont couvertes de terre, et sur ces terrasses mamelonnées pousse de l’herbe : un escalier ou une échelle peut y mener, du fourrage y sèche, des branchages y sont parfois entreposés.

 Celui qui pénètre dans ces maisons a le sentiment d’être brutalement transporté dans un autre monde, impressionnant et mystérieux, il se croit projeté dans l’intérieur d’une pyramide à degrés. Mais cette solennité n’est pas la seule surprise, car ces intérieurs ne sont pas aussi sombres qu’on aurait pu le penser : une lucarne centrale y fait glisser un intense rai de lumière. Cette lucarne, très haut placée, est à proprement parler ce qu’on appelle yertik, terme qui, par extension, peut désigner la maison en son entier ; source de jour et orifice faisant office de cheminée, elle est exactement à l’aplomb du trou central, le tonir, lieu du feu, de la chaleur, lieu vital où sont cuites les grandes feuilles de pain, le  lavash. Toute la maison s’organise autour de ce centre lumineux, chaleureux et nourricier.

Une charpente très étonnante relie les murs de la maison et la haute yertik. Un carré ou un octogone de poutres robustes et parfois très raffinées ou de branches sont le point de départ. Sur cette première structure est placée, en encorbellement, une deuxième structure plus petite mais de même forme. Pour que cette deuxième structure puisse tenir, ses angles reposent au milieu des côtés de la première structure. Ce système peut être repris jusqu’à huit fois. Dans un autre cas de figure, pour permettre le passage du carré inférieur au carré supérieur, deux des poutres du deuxième carré sont prolongées jusqu’à deux des poutres du premier carré, constituant une sorte de brancard portant cette deuxième structure.  Toutes ces charpentes, dites en  hazarashen (littéralement « mille-poutres »), sont ce qui produit l’effet de pyramide, sans que, dans un premier temps, on parvienne à en comprendre l’agencement.

Telle est la technique, telle est la présence symbolique d’un monde rural qui transparaissent encore aujourd’hui, qui vivent encore d’une autre manière mais sans coupure définitive. En conserver les solides et authentiques témoignages est un devoir.